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Logement et Vulnérabilité : comment la métropole brestoise y répond

Tifenn Quiguer, Vice-présidente de Brest métropole en charge de l’habitat, explique les politiques engagées par la métropole pour répondre aux défis du logement pour personne vulnérable.

La notion même de vulnérabilité est complexe car de nature polymorphe – « je suis vulnérable car dépourvu de logement ou vivant en habitat indigne ou inadapté ; fragilisé au regard de mes difficultés de santé (vieillissement, handicap, trouble psychique …) ou encore économiques et sociales (…) ».

Sujet empreint de complexité « loger ou héberger les plus vulnérables d’entre nous ».
C’est une lourde responsabilité, mais elle se justifie pleinement au regard du rôle qu’une collectivité telle que Brest métropole joue en tant que « faiseur de cohésion social » et « ensemblier ».

Dès 1989, la communauté urbaine, aujourd’hui métropole, en tant que « chef de file habitat et logements accompagnés » bousculait les pratiques et habitudes des uns et des autres pour construire une cohérence d’ensemble, une politique globale en matière de logement et d’habitat, en associant les acteurs locaux au sens large (Etat, collectivités territoriales, bailleurs publics et privés, promoteurs, notaires, associations, services sociaux…) et ce au sein d’une instance collégiale : une Conférence Intercommunale de l’Habitat.

Il s’agissait de donner la possibilité aux acteurs locaux, aux experts d’usage, de s’organiser, de coopérer et de simplifier les dispositifs de réponses aux ménages. C’est l’exigence que la collectivité s’est toujours donnée : créer une gouvernance solide en réseau.

Sous cette impulsion, les acteurs métropolitains, institutionnels et associatifs, ont vite compris que faute d’identification des problématiques de vulnérabilité des ménages accompagnés et de partage de ces difficultés, ne pouvait régner que cacophonie et confusion professionnelle et désespoir des ménages.

D’une certaine façon nous avons anticipé et préfiguré le droit au logement opposable (DALO) instauré par la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007. Depuis plus de 25 ans nous échangeons sur les évolutions sociétales, sociales et urbaines. De ces contenus et diagnostics partagés, nous avons construit un véritable édifice d’outils de solidarités et de réponses à la fragilité (qu’elle soit physique, psychique ou sociale).

Parce que cette vulnérabilité des ménages a de nombres visages, les prises en compte sont nécessairement multiples. Un axiome néanmoins : le logement et l’hébergement d’insertion sont deux dimensions indissociables d’une politique du logement.

Cette politique doit pouvoir s’appuyer sur une offre diversifiée et adaptée aux besoins des personnes dites vulnérables. Nous travaillons ainsi sur tous les champs de l’hébergement et du logement en matière d’accès ou de maintien. Le principe étant « l’exigence de se saisir de chaque situation de mal logement ou de non logement ou de difficulté de savoir habiter et d’apporter une réponse adaptée au besoin ».

La collectivité a ainsi construit un partenariat historique avec les organismes d’habitat public et plus particulièrement avec l’Office public Brest métropole habitat. Pour illustrer : la mise en œuvre d’un accord collectif intercommunal qui fixe aux organismes hlm du périmètre métropolitain des objectifs quantitatifs d’offre de logement dédiés aux ménages dits prioritaires ou potentiellement prioritaires au sens du DALO.

Sur le champ de l’hébergement et du logement d’insertion, Brest métropole et ses partenaires ont créé au fil du temps plus de 1500 solutions d’accueil pour les plus vulnérables au sein d’un dispositif original - la Commission d’Accompagnement Social et d’Accès au Logement (appelée la CASAL). Ce système partenarial et opérationnel très « intégré » est animé par deux conseillers logements et un coordinateur Service Intégré d’Accueil et d’Orientation du Finistère (SIAO 29).

On y accompagne les ménages les plus fragiles par le biais de mesures d’accompagnement social lié au logement (ASSL) (suite d’expulsion locative et/ou difficulté de gestion du budget ménage, trouble de voisinage, impossibilité de vivre en logement collectif, problématique de savoir habiter (syndrome Diogène…) ou encore besoin d’accompagnement pour une acquisition d’autonomie logement) et on y adosse une orientation logement ou hébergement.

On consolide nos réponses en portant de nouvelles offres d’accueil (type résidence MADEN, logements pour personnes en souffrance mentale gérée par l’UDAF). En constate adaptation ce mode d’organisation a fait ses preuves puisque nous ne constatons sur le bassin de vie que de rares saisines DALO.

Parallèlement, la lutte contre l’habitat indigne mobilise depuis 2005 la collectivité. Une première convention signée avec l’Etat dans le cadre d’un programme d’Intérêt Général Habitat durable concrétise cette priorité de l’action publique. Une seconde convention, en 2011, rend opérationnel une commission métropolitaine spécifique de lutte contre l’habitat indigne et la précarité énergétique.

Ainsi toutes situations repérées et expertisées d’indignité logement ou de précarité énergétique sont examinées. Cette démarche partenariale répond aux exigences du cadre législatif – la loi Mobilisation pour le logement et la lutte contre les exclusions du 25 mars 2009 (MOLLE), celle du 12 juillet 2010 Grenelle II, la loi pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové (ALUR) du 24 mars 2014 et transition énergétique.

En trois années d’exercice 2011-2013, plus de 150 situations ménages en indignité d’habitat ont été accompagnées et plus de 200 conseillés par le Service Local d’Intervention pour la Maitrise de l’Energie (SLIME).

Le spectre de cette action publique est large ; du préventif à l’incitatif jusqu’au coercitif. Ainsi, des logements qualifiés d’indignes peuvent être frappés d’arrêtés de polices spéciales de la responsabilité du maire ou du préfet (arrêtés de locaux impropres à l’habitation, arrêté d’insalubrité, ou infraction RSD..). Ces arrêtés visent à imposer la réalisation de travaux et, autant que nécessaire, le relogement ou l’hébergement temporaire des occupants dans un délai déterminé. Ce volet coercitif se prolonge dans un panel de sanctions pénales visant plus particulièrement les marchands de sommeil. Citons par là même le procès au TGI en mars 2014 opposant la métropole et la ville de Brest, parties civiles, contre un propriétaire « indélicat ».

Aussi, si l’on porte le regard au-delà du périmètre métropolitain brestois, on constate que les acteurs bretons ont su depuis de nombreuses années mettre en œuvre des politiques qui répondent aux besoins d’hommes et de femmes, de familles fragilisés et/ou confrontés à des difficultés de tout ordre.

Ces politiques reposent sur 7 nécessités :

  • Un Etat, garant de la cohésion sociale et en mesure d’accompagner une réelle politique du logement reposant sur une volonté de produire du logement accessible, d’assurer la solvabilité des ménages et de prévenir les expulsions ;
  • Des choix politiques de gouvernance locale impliquant de manière déterminante les collectivités locales travaillant avec l’ensemble des acteurs et opérateurs du droit au logement ;
  • Des instances locales inter acteurs permettant de partager de manière régulière et pérenne le diagnostic et les orientations pour les publics concernés ;
  • Des opérateurs du logement, de l’hébergement et de l’accompagnement compétents et à même d’exercer leurs missions dans des conditions satisfaisantes de travail ;
  • Une diversité des réponses à apporter sur les territoires en fonction des besoins exprimés et analysés de manière partagée ;
  • Les moyens financiers de la diversité et les moyens de l’accompagnement qui vont ensemble de manière indissociable ;
  • Une production de logements abordables en nombre suffisant, dans le respect de la mixité sociale et d’une offre d’hébergement « humanisé » pour répondre aux besoins.

Seul un « écosystème » multi partenarial où chacun prend responsabilité au regard de ses compétences permet de fonder autant de réponses logement/habitat que vous appelez « habitat protecteur ou pluriel ».